En octobre, le village était souvent balayé par le vent d’est. Le soir venu, une fois le vent tombé, nous traversions le jardin et, nous faufilant entre les roseaux, nous nous retrouvions dans le bois de pins. Les arbres, d’une dizaine de mètres de haut, desséchés par les fortes chaleurs de l’été, perdaient une grande quantité de branches mortes. Nous nous empressions de les ramasser, et lorsque nos petits bras en étaient pleins, nous courions déposer notre charge dans le jardin pour revenir, encore et encore, jusqu’à ce que l’obscurité nous obligeât à rentrer, fatigués mais heureux.
Parfois, ma grand-mère nous envoyait cueillir des plants de chendgoura ― ajuga iva ― qui poussaient en abondance dans le bois. Les petites touffes de feuilles allongées perçaient l’épais tapis d’aiguilles et se développaient en groupes de trois ou quatre, semblables à de grosses araignées vertes guettant une proie. Nos yeux balayaient le sol dans toutes les directions et dès que l'un de nous deux en apercevait une, il s'empressait d'aller l'arracher pour ne pas la laisser à l'autre. Nos doigts en devenaient tout verts et collants et la forte odeur de musc qui s’en dégageait nous écœurait un peu. De retour à la maison, il fallait les frotter longtemps avec du savon, sous l’eau du robinet, pour en ôter l’amertume.

Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire